lundi 28 mai 2007

les marais comme des madeleines


Il est de ces moments passés au fond d'une salle obscure que l'on n'oublie pas...ça vous hante, ça vous enchante, ça vous effondre, ça vous "pulvérise" pour reprendre le mot d'ordre des marais.
En ces temps où bon nombre d'entre nous se heurte à d'effroyables visions d'un avenir où s'esquisse une sombre impasse, il est de bon ton de rédiger "l'ordonnance cinématographique des marais". Pour que le rêve, l'abandon prennent le dessus sur la morosité de la vie quotidienne. Pour que vous preniez soin aussi de vous munir des accessoires indispensables à la vision du film dont nous allons vous faire l'éloge : lunettes de soleil Ray ban ou Prada, autant rester mouluré-doré,et caisson d'isolation pour ne pas se laisser gagner par le ridicule au sortir de la salle (les marais en étaient dépourvus, l'humiliation fut terrible).


"Les chansons d'amour" ou la ronde sentimentale d'un quatuor d'aujourd'hui , autour duquel gravitent quelques pépites humaines et quelques plaisirs et souffrances.
Quatre personnages principaux mais des milliers de raisons d'aller voir ce film chanté ("enchanté" pour reprendre l'expression de Jacques DEMY, cinéaste qui semble lancer des poussières d'étoiles sur ce film qui lui doit tant et lui rend hommage de la plus belle façon qui soit, tout en sachant prendre ses marques et se draper d'une aura unique).
Rarement mélange des tons, des genres n'aura fonctionné si bien, jamais légèreté et gravité n'avaient cohabité de façon aussi spontannée formant un maelstrom prégnant, un flux continue d'émotions diverses, de répliques tantôt cruelles tantôt douces.



Pourquoi tant d'amour?surtout venant des méchants marais?
Parce que Paris n'avait pas été aussi bien filmé, même "Dans paris", depuis des lustres: gris et lumineux, grouillant et solitaire , bobo et social.
Parce que les intermittences du coeur sortent grandies de ce cocktail de crudité, de pudeur, de douleur et de tendresse, de futilité et de sensibilité.
Parce qu'un breton "ça sent la pluie, l'océan et la crêpe au citron".
Parce que de ces atermoiements ressort aussi bien de l'espoir que de la tristesse, dualité qui fait les vrais films d'amours, les bons films en général.
Parce qu'il est question de manigances entre les diables et les anges pour que la défunte tombe dans les bras de son amant esseulé lors d'une complainte qui n'a d'égal que l'énergie du désespoir.
Parce que le film se regarde, s'écoute, se caresse et finit par se blottir contre vous.
Parce que le deuil se fait en chanson, en silence ou en cris, mais chuchotte sa douleur avec des mots et des images inoubliables.
Parce que l'amour y est ouvert, élargi au champ de tous les possibles et tamisé au fond d'une chambre secrète.

Mais une seule raison pourrait suffire pour les marais, et elle sera probablement plus fidèle à leur image: on y trouve son compte de moulures lors de mouvements de caméra qui rappellent certains haussements de tête dans les rues Bordelaises...

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